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17 mai 2010 1 17 /05 /mai /2010 20:53

Naufrage2.jpg

Des houles démesurées et croisées se rencontrent parfois, au milieu de nulle part, dans des endroits isolés de l’océan. Des rumeurs se répandent à leur sujet. Elles atteignent paraît-il des hauteurs gigantesques, jusqu’à plus de trente mètres selon certains. C’est avec timidité que j’annonce ces dimensions. Elles semblent tellement factices et tout droit sorties de roman de Jules Vernes.

Mes voyages en mer m’ont amené à me rendre compte par moi-même, et donner un sens à cette phrase si souvent entendue : je ne crois que ce que je vois.

Je crois maintenant.

Une autre phrase résonnait dans mon inconscient : mieux vaut regretter ce que l’on a fait que ce que l’on n’a pas fait.

J’avoue émettre de sérieux doutes quant à la véracité de celle-ci.

J’ai vu une de ces vagues. Elle s’est dressée soudainement, terrible et arrogante, elle brillait dans la nuit sombre, violentée par une dépression robuste et décidée.

Le cargo d’acier qui me transportait a hurlé des cris stridents. Il s’est disloqué en peu de temps. Des images de Tsunami percutant une côte m’ont agressé. Nous étions loin, un petit point à peine visible sur la carte. L’eau n’a fait qu’une bouchée du monstre de m étal. Elle est passée avec furie sur le pont, a déchiqueté la coque pour la grignoter de l’intérieur.

Quelques secondes, quelques cris rapidement noyés et la mer a affiché un sourire émeraude en surface, fière de sa puissance, fière de nous rappeler qui domine en ce bas monde.

 Je ne vois plus personne. Le ciel continu à gronder, de puissants éclairs frappent l’eau et m’aveuglent pour un temps. L’océan est redevenu sombre et inhospitalier. Des crêtes d’écumes jaillissent parfois, me roulent et me maltraitent.

Je ne veux plus y prêter attention, puis un flash m’attire le regard. Je lutte de longues minutes pour m’en approcher. Une balise ! Quelqu’un a eut le temps de déclencher une balise, quelqu’un qui a su mettre sa survie de côté pour sauver d’autres humains plus nombreux. Peut-être y en a –t-il d’autres autour.

Je ne lâche plus la balise, espoir impossible, mais je suis à bout. Je ferme les yeux, quand je les ouvrirai de nouveau, je serai probablement dans cet au-delà que l’on ne peut imaginer.

J’entends un bruit, des moteurs. Ils passent au-dessus de moi, ils reviennent. Je souris un cours instant. Je vais reposer le pied à terre, je vais marcher, je vais revoir mes proches. Mais mon cœur cesse de sourire, il me pique soudain, une pensée d’angoisse qui me donne envie de sombrer. Et si j’étais le seul d’entre nous à revoir la terre…

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