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22 avril 2011 5 22 /04 /avril /2011 15:42

Rocher.jpg

Les voiles battent sans conviction, mollasses et trainantes. Des gouttes de sueur perlent de mon front. Un léger souffle me fait soudain frémir et gonfle de fierté les tissus blancs désolés. Une vague de fraîcheur me caresse bientôt le visage.

L’étrave commence à fendre doucement les flots, les mouvements se faisant de plus en plus saccadés. Les écoutes commencent à craquer, puis hurlent leur résistance aux éléments.

Le clapot est englouti d’un rouleau turquoise, un autre se dresse puis encore un. Ils se mettent à croquer la surface de toute part. Les appendices vibrent maintenant. L’eau court sur elle-même en fines couches en furie.

Le navire s’emballe, se fait malmené mais ne rompt point. Un sifflement strident retentit dans les épars, alors que le ciel s’assombrit toujours plus, teintant l’océan de couleurs inquiétantes.

Les bras ballants, je ne peux qu’admirer, m’extasier, me délecter de cette soudaine puissance que nous tentons d’essuyer. Et quand bien même, nous avalerai-t-elle, sans doute en éprouverai-je une certaine fierté.

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22 octobre 2010 5 22 /10 /octobre /2010 12:39

ciel.jpg

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15 juin 2010 2 15 /06 /juin /2010 09:45

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Les galets sont semblables à la foule estivale. Amassés dans un lieu unique, certains osent s’aventurer, en groupe, puis s’éparpillent.

Le soleil frappe la roche et l’océan. Les peaux grillent doucement, anéantissent leur capital.

Le bateau passe, au loin, inaperçu, chacun trop affairé à se brunir jusqu’aux dents. Il crée une vague que l’on ne peut soupçonner. Une vague démente qui avale les rochers en silence, s’approche et aspire la fine couche liquide sur le sable. Elle se fortifie, gonfle, se lève soudain en hurlant sa présence.

Les corps aventureux s’arrêtent brusquement, les visages se figent dans des moues angoissées.

Un homme se met à courir, puis un autre et l’on assiste à une débandade sonore et désorganisée. La lame est magnifique, lisse, fière comme une mâchoire immaculée salivant du plateau offert.

Quelques embruns s’évadent et la masse liquide s’abat, retenant les souffles, provoquant une longue attente. L’eau courre vers le large.

Les galets ont creusé leur tanière dans le sable fin, ils ont fait le dos rond et reçu la mer comme une caresse de plus, une caresse sauvage. Ils se regardent, fiers et imperturbables.

Un cri déchire l’atmosphère, la deuxième vague se dresse, relève les babines et affiche de longues dents blanches.

Elle ne sera pas aussi courtoise que la première.

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17 mai 2010 1 17 /05 /mai /2010 20:53

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Des houles démesurées et croisées se rencontrent parfois, au milieu de nulle part, dans des endroits isolés de l’océan. Des rumeurs se répandent à leur sujet. Elles atteignent paraît-il des hauteurs gigantesques, jusqu’à plus de trente mètres selon certains. C’est avec timidité que j’annonce ces dimensions. Elles semblent tellement factices et tout droit sorties de roman de Jules Vernes.

Mes voyages en mer m’ont amené à me rendre compte par moi-même, et donner un sens à cette phrase si souvent entendue : je ne crois que ce que je vois.

Je crois maintenant.

Une autre phrase résonnait dans mon inconscient : mieux vaut regretter ce que l’on a fait que ce que l’on n’a pas fait.

J’avoue émettre de sérieux doutes quant à la véracité de celle-ci.

J’ai vu une de ces vagues. Elle s’est dressée soudainement, terrible et arrogante, elle brillait dans la nuit sombre, violentée par une dépression robuste et décidée.

Le cargo d’acier qui me transportait a hurlé des cris stridents. Il s’est disloqué en peu de temps. Des images de Tsunami percutant une côte m’ont agressé. Nous étions loin, un petit point à peine visible sur la carte. L’eau n’a fait qu’une bouchée du monstre de m étal. Elle est passée avec furie sur le pont, a déchiqueté la coque pour la grignoter de l’intérieur.

Quelques secondes, quelques cris rapidement noyés et la mer a affiché un sourire émeraude en surface, fière de sa puissance, fière de nous rappeler qui domine en ce bas monde.

 Je ne vois plus personne. Le ciel continu à gronder, de puissants éclairs frappent l’eau et m’aveuglent pour un temps. L’océan est redevenu sombre et inhospitalier. Des crêtes d’écumes jaillissent parfois, me roulent et me maltraitent.

Je ne veux plus y prêter attention, puis un flash m’attire le regard. Je lutte de longues minutes pour m’en approcher. Une balise ! Quelqu’un a eut le temps de déclencher une balise, quelqu’un qui a su mettre sa survie de côté pour sauver d’autres humains plus nombreux. Peut-être y en a –t-il d’autres autour.

Je ne lâche plus la balise, espoir impossible, mais je suis à bout. Je ferme les yeux, quand je les ouvrirai de nouveau, je serai probablement dans cet au-delà que l’on ne peut imaginer.

J’entends un bruit, des moteurs. Ils passent au-dessus de moi, ils reviennent. Je souris un cours instant. Je vais reposer le pied à terre, je vais marcher, je vais revoir mes proches. Mais mon cœur cesse de sourire, il me pique soudain, une pensée d’angoisse qui me donne envie de sombrer. Et si j’étais le seul d’entre nous à revoir la terre…

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16 mai 2010 7 16 /05 /mai /2010 10:54

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Je suis frigorifié.

Les premières heures étaient supportables. La lumière du jour me rassurait, mes yeux étaient utiles et il était encore là et vivant. Nous pouvions bavarder, nous motiver l’un l’autre, échanger des lueurs d’espoir. Il bougeait beaucoup, sans doute pour se sentir vivre. Il rigolait, occultait la situation désespérée et improbable dans laquelle nous nous trouvions. Je parvenais encore à rire, puis seulement à sourire, puis je n’étais capable que d’une détresse qui me tordait le visage.

D’abord, il s’est tu. Il ne répondait à mes questions qu’avec un hochement de tête et un petit râle à peine audible. Il s’est ensuite arrêté de bouger. Je le regardais, j’ai vu sa tête s’incliner dans un ultime mouvement, s’incliner vers les profondeurs et demeurer là, inerte. Si seulement j’avais pu prier…

Je n’ai pas eu la force de hurler. Mon cœur déchiré le voulait mais mon corps, endoloris, refusait toute action. Je ne l’ai pas quitté des yeux, ma façon de rester auprès de lui. Il s’est éloigné doucement, poussé par un vent glacial et piquant, et il a disparu. Je suis désolé, mes forces m’avaient déjà abandonné et je ne pouvais te maintenir à mes cotés.

J’entends encore son rire, j’entends encore son espoir résonner en moi. J’essaie de le cultiver, je n’ai jamais été très doué avec les plantes et je suis frigorifié.

Les objets du naufrage ont disparus de ma vue, comme si H. les avait emporté avec lui, comme s’il voulait que je me débrouille seul, comme s’il n’y avait pas de raison pour que je vive et pas lui.

Je sens des choses sur mon corps. Je n’ose imaginer ce qu’elles sont. Je ne veux pas éprouver de peur en plus. Je sais pourtant qu’il me tourne autour. Ces vautours sous-marins attendent mon heure, attendent que ma chaire s’attendrisse. Ils viennent palper de temps à autre ma peau bleue fripée par le sel et le froid. Je les ignore, du moins j’essaie.

J’aurais aimé partir le premier, ne pas vivre ces heures d’angoisse où l’espérance n’a pas sa place. Mon instinct de survie en a voulu autrement. La vie se venge de ce que je lui ai infligé. Elle maintient mes douleurs et en provoque de nouvelles chaque minute.

Mais je suis serein maintenant. Je n’en ai plus pour longtemps. Quelque chose m’a croqué tout à l’heure. Je ne sens plus mes jambes mais mon sang qui s’en échappe et ma tête et mes pensées qui s’empâtent doucement.

Mais après tout, c’est moi qui décide. Alors je lâche la bouée, dernier vestige de mon navire qui a sombré. Je coule, je me libère, enfin, ça fait du bien, je n’ai plus froid maintenant.

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11 mai 2010 2 11 /05 /mai /2010 09:23

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Le ciel nous a régalés de son spectacle quotidien de fin de journée. Le vent est soutenu et portant. La houle nous pousse, nous accélérons régulièrement, le bateau vibre dans son ensemble et la barre est délicate et précise.

Nous échangeons les consignes pour les quarts de nuit, puis je reste seul, seul face à l’océan, seul face à la magie inquiétante d’une nuit en mer. Un sentiment étrange me circule dans les veines. Je tente de l’ignorer et de me fondre à la coque qui glisse allègrement.

Des gerbes émanent de l’étrave, j’ai la peau salée et les vêtements trempés.

Les voiles en ciseaux font rouler le canot de bâbord sur tribord me laissant apercevoir de temps à autre une vision partielle de l’horizon sombre qui coure devant moi.

Une heure s’écoule sans encombre. Les vitesses augmentent. Le vent a forcit et la mer en réponse grossit. Le ciel étoilé disparaît limitant ma vue à quelques mètres. Des grondements lointains se manifestent. Un orage lumineux se forme au loin. Nous devrions l’éviter, je l’espère. Je garde mon cap et refoule les pincées d’angoisse qui me piquent le cœur.

Lorsque les balancements de plus en plus violents me l’autorisent, je devine une lumière au loin. L’absence de pilote et l’allure arrière m’interdisent de m’éloigner de la barre. Je suis concentré. La lumière semble grossir, difficile d’évaluer une distance dans ce noir absurde et dense. Je crie et tente de réveiller Antoine : pas de réponse.

Mon cœur bat la chamade, le compas semble faire des tours sur lui-même et la lueur s’intensifie maintenant à vue d’œil.

N’ayant aucun moyen de manœuvrer depuis le poste de barre, je commence à marteler le pont et à crier, emprunt à la panique.

Une tête endormie finit par émerger de la descente. Je m’apaise un peu :

-Tu vois la lumière là-bas ?

-Non, où ça ? Pourquoi tu t’énerves, je suis dans le gaz moi, me dit Antoine.

-Regardes sous la GV. Quand le roulis et la houle le permette, il y a une lumière rouge, non verte, enfin chais pas, il y a une lumière qui ne cesse de s’approcher. Regardes bien, ça m’inquiète.

-Oui, ça y est, je la vois, c’est quoi ? me demande-t-il.

-Bah le métro lui dis-je agacé. A ton avis, un cargo surement, mais je ne parviens pas à évaluer sa distance et direction.

-Moi non plus…

Antoine pose le tangon sur le pont afin de permettre une manœuvre d’urgence. Il est en train de l’arrimer au bastingage lorsqu’une gerbe d’eau gigantesque éclate à quelques encablures de la proue : la vague d’étrave du cargo !

Mon sang se glace, mon pied pousse violemment la barre et mes mains avalent aussi vite que possible l’écoute de GV choquée en grand dans une tentative de lof désespérée. Le cargo n’est qu’à quelques mètres et nous peinons à tourner.

Lorsque les voiles se mettent à battre avec fracas, l’étrave face au vent, et le corps tout tremblant, nous regardons défiler derrière l’équivalent d’un immeuble de cinq étages sur trois cents mètres.

Comme un fantôme dans la nuit, sans bruit et sans mouvement, il continue sa route, imperturbable et disparaît dans les creux de houle devenus des gouffres.

La tension retombe et l’attention redouble, nous sommes vivants, au sec et le bateau file de nouveau de vague en vague indifférent aux angoisses humaines.

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4 mai 2010 2 04 /05 /mai /2010 09:35

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En Mai, nous supportons les giboulées.

Le ciel rage des humains écervelés.

Il poignarde et glace le sang,

Mais je sors et vais l’affronter.

J’ai suivi mes pieds, ils allaient d’un pas décidé, indifférents à l’hiver revenu.

Ils m’ont conduit en ce lieu, où la communion est de rigueur.

Le vent fouettait la peau et les embruns dansaient et brillaient lorsque mon regard fût attiré, un être étrange, long, humide et rampant.

Il a glissé, se mêlant au désert alentour. Un désert de sable et d’eau, un désert entre la vie et la mort.

Il m’interrogea, me réclama un choix.

Je n’ai pas voulu écouter.

Je suis resté là, indécis.

Le ciel me dessina des réponses,

Je les occultais.

Le sable traça un chemin,

Il était plat et sans intérêt.

L’eau se retira offrant un passage,

Je n’avais pas les souliers adéquats.

L’être étrange se présenta à nouveau,

Et de rage je le piétinais, le laissais inerte et éventré.

Au mois de Mai, je fais ce qu’il me plaît.


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3 mai 2010 1 03 /05 /mai /2010 11:45

Un grondement sourd, mon corps dans son intégralité vibre.

Je regarde.

Le houle imperturbable progresse et frappe.

De longues lignes se dessinent, viennent embrasser la falaise.

Les mouettes, sourire au coin du bec, planent, s’agitent, se chahutent, frottent la surface d’un bout d’aile tremblant.

La terre se colore et souri à l’océan.

Des nappes d’écumes blanches se répandent, se dandinent en réponse au soleil levant.

Le ciel strié change de visage, il s’émerveille et s’enchante,

Des flaques de lumière grandissent, caressent la côte, la réveillent d’un jaune matinale.

La marée aspire l’océan, elle gonfle les vagues qui glissent en déferlant.

Une matinée qui réjouit les sens, et le voilier là-bas, une petite tâche blanche.

Le sourire du marin qui en émane, il brille,

La nuit l’a épargné,

Il s’emplie du plaisir de voguer.

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22 avril 2010 4 22 /04 /avril /2010 14:44

Faisceau.jpg

Nous sommes surveillés. Des caméras, des yeux, des indics se dissimulent. Ils sont là, invisibles, chaque centimètre carré de la planète est observé à notre insu. Certains le sentent, d’autres préfèrent l’ignorance.

Nous avons cherché le lieu isolé, l’endroit où nous serions libres de nos faits et gestes. Chacune des tentatives fût vouée à l’échec. Chacune des tentatives emporta l’un d’entre nous.

Nous rampons, nous nous cachons, les sens en alerte. Nous avons appris à reconnaître chaque son, chaque bruit. Nous nous sommes créés un monde d’aveugle, et vivons terrés dans les bas-fonds, à l’affût d’une invasion dévastatrice. Dans notre survie, le mot plaisir a été brulé, emportant les sentiments qui lui sont liés. Les plus jeunes ne l’ont jamais prononcé et en ignorent la sensation.

Une femme parmi nous attire mes sens, me mets en ébullition. Je m’efforce de refouler. Le temps et l’espace me manque. Nous sommes à fleur de peau en permanence. Nous sommes sur le qui-vive, fuyant les sons et la lumière. Nous vivons dans le noir et le silence.

Je me souviens de la terre. Des couleurs changeantes la couvraient jadis, différentes à chaque heure du jour, mystérieuses et enchanteresses la nuit. Voilà des notions enterrées depuis des lunes.

Un trop plein m’englouti. Peut-être la mort est-elle plus animée ? Peut-être est-elle plus colorée ?

Après le couvre-feu, j’irai trouver la femme. Je lui parlerai, je la toucherai. J’ai une proposition impossible à lui faire : tenter une évasion, rejoindre cette étendue qui submerge les terres.

J’ai remarqué, lors d’une sortie en quête de vivres, une forme creuse qui se dandinait sur de petits monticules liquides. Je vais lui proposer de nous cacher dedans, elle et moi. Mes parents m’en ont parlé avant d’être déportés. Ils appelaient l’étendue l’Océan. Il existe paraît-il des îles, bouts de terres émergeant où seuls règnent des animaux, des végétaux. La nourriture pousse dans les arbres, l’eau potable coule naturellement. Si je suis mon instinct disaient-ils, j’y parviendrais.

Je vais l’emmener là-bas, je lui demanderai son nom, et prendrai soin d’elle. L’épreuve sera dure. L’océan est parfois violent disait mon Père. Mais j’aborderai et quand bien même, je disparaitrai en homme libre, proche de la personne de mon choix. Ils m’ont décris cette notion de liberté. Je veux la gouter.

Elle est, semble-t-il, la sensation la plus douce qui soit.

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21 avril 2010 3 21 /04 /avril /2010 10:32

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Un écho puissant est présent,

Résonnant dans les cavités béantes du cerveau.

Des feuilles s’agitent au gré du vent,

Accueille l’astre rouge surplombant le clapot.

Des jours que je ne contemple plus,

Des jours intériorisés,

Les nuages qui déchirent le soleil,

Sont autant d’idées me déchirant les pensées.

Pastel et lignes lumineuses écoutent les drisses qui fouettent,

Irrégulières, indisciplinées,

Donnent vie au rafiot échoué.

D’autres flottent ici et là,

Ils lèvent le menton, arrogant,

Puis s’inclinent, résignés et humbles.

Les plantes fières, dressent haut leurs épines,

Elles attendent les tigres et courbent l’échine.

Une femme passe,

Dissimule la lanterne matinale,

Elle l’emporte, plonge ma vision dans le noir.

Je pensais assister au lever du jour,

Et la tombée de la nuit m’envahie.

Un ciel dépourvu d’étoile, un ciel sombre et triste,

Alors je cours,

Je cours vers l’est.

Je ne veux plus attendre,

Et vais à la rencontre de celui qui tarde à s’élever.


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