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30 mars 2010 2 30 /03 /mars /2010 22:24

 

Perdu.jpg

 

Je marche, je marche, je ne sais plus très bien pourquoi…

Je suis sorti ce matin avec l’intention de me perdre dans la campagne. Il me semble que c’est réussi. Quel doux sentiment que d’errer incertain dans la nature !

Sortant d’une petite forêt, je me trouve dans un jardin face à un arbre dissimulant une habitation. Je contemple l’arbre un moment : magnifique, dénudé, robuste, des insectes de partout. Je ne la touche donc pas et le contourne.

La cabane semble déserte. Je crie, je hurle, je chante, aucun écho.

Je trouve la porte, pose ma main sur la poignée et à peine l’ai-je tourné que tout le mur autour de la porte s’effondre.

Je lâche doucement le loquet, elle reste debout, au moins une bonne chose. Je recule un peu et lève les yeux. Le ciel est menaçant. Tant pis, je rentre dans la maison. Je laisse la porte fermée et debout, on ne sait jamais…

Une odeur insupportable de renfermé m’agresse le nez et me pique les yeux. Je me dirige vers la fenêtre. Un moment d’hésitation, je pose la main sur la poignée. Je m’en doutais, le mur autour s’effondre.

Le coté positif : le courant d’air est largement suffisant.

Le coté négatif : je ne suis plus vraiment protégé de la pluie qui tombe maintenant avec force.

J’aperçois un escalier. Le grenier, lui, doit être à l’abri…

L’escalier donne sur une trappe. Je pose la main sur celle-ci et … oui, le plafond s’écroule me laissant désœuvré sur mon promontoire.

La vue est intéressante : une maison à deux murs, une cheminée, un toit et un escalier central.

Je redescends prudemment et m’approche de la cheminée. Du bois bien sec repose sur le coté. Je m’hasarde. Je pose une buche sur le foyer… Le toit s’écroule.

Je me réveille à l’hôpital.

A l’avenir, j’éviterai d’essayer de me perdre ou j’essaierai d’éviter de me perdre, bref pour ne pas me perdre à essayer d’éviter  ou à éviter d’essayer, je resterai à la maison ou suivrai des chemins bien tracés.

 

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18 mars 2010 4 18 /03 /mars /2010 16:57
Paris.jpg
La grisaille envahissait l'horizon
La foule courrait, roulait, marchait
Imperturbable, automate et arrogante
Errant dans cette folie urbaine
La femme jetait des regards perdus
Ses yeux appelaient à l'aide
Ses mains tendues réclamaient l'aumône
Les passants insensibles levaient les yeux
Un pigeon passa
Une liberté s'exprima
Dans les airs
et cloîtrée sur le bitume crasseux
Le femme s'enracina
Apercevant le vol de l'oiseau
Elle esquissa une moue joyeuse
Et arracha du sol stérile
Les liens tentant de la rendre immobile. 
 
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12 mars 2010 5 12 /03 /mars /2010 12:52

 

Volcan

      Des sons lui parviennent,

Tendant l’oreille, ils se distinguent.

Bruits de morts, bruits de l’au-delà,

Des os qui claquent, des crépitements.

Une chaleur sinistre l’étouffe,

Des visages se dessinent,

Ephémères, oubliés, brulés,

Et se volatilisent dans un souffle.

Les ténèbres grondent,

Il tremble, cherche son ombre.

Ces murs qui se dressent,

Cloisonnent sa détresse.

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1 mars 2010 1 01 /03 /mars /2010 10:45

Le soleil offrait des couleurs radieuses, contrastant avec les grains sombres éparses. Ma fille, à l’arrière de la voiture, semblait calme, les yeux rivés sur le jour qui s’imposait. Je la déposais rapidement au jardin d’enfants et m’évadais dans mes rêves, recherchant une quelconque inspiration.

J’étais préoccupé et quelque peu énervé sans parvenir à me l’expliquer. Installé dans un café, je fixais les clients rentrer et sortir, me laissais envahir par le brouhaha, appréciais le calme revenu après l’heure de pointe. Mon téléphone se mit à vibrer. Appel inconnu, je décrochais.

Je me fis à moitié agresser par la directrice de la crèche. Je devais m’y rendre au plus vite. J’entrais dans le bâtiment et découvrais ma fille de deux ans debout dans le couloir, jetant des regards noirs et méprisants autour. Elle soutenait tous les visages avec autorité et arrogance, une certaine fierté me pinçait le cœur.

Elle avait, d’après les dires, réveillé chacun des enfants essayant de dormir, jeté son assiette par terre, sans vouloir ramasser. Ses camarades pleuraient, l’un avait un œil bleu, un autre des empreintes de mâchoires dans le bras, un autre encore présentait une bosse conséquente sur le haut du crâne, je préférais arrêter là mon observation.

Les assistantes étaient toutes remontées et à fleur de peau. Elles semblaient désespérées, à bout de nerfs et me lançaient des remontrances en me jetant des éclairs perçant de leurs yeux humides.

Je les interrogeais. Ma fille était intolérable et l’école ne pouvait continuer de supporter les sautes d’humeur agressives de ma petite. Elles se voyaient dans l’obligation de renvoyer, sans préavis, ma fille au sourire charmeur. C’était un renvoi définitif accompagné d’un avis adressé à toutes les écoles de France sur le caractère « insupportable » et « irrespectueux » de mon bébé.  « Elle prend ses camarades pour des poupées de plastique » (ce qui pour certains est plausible). « Elle tape et rigole ». Elle présente une « incapacité à vivre en communauté ». Ils étaient donc « dans l’obligation » de prévenir tout établissement susceptible de recevoir mon enfant.

Toute discussion inutile, nous repartions ma fille et moi. La route longeait l’océan. Je voyais, dans le rétroviseur, ma petite, les yeux égarés dans la beauté environnante, l’air calme et apaisé. Elle me souriait, mon cœur battait de tendresse. Nous finissions la journée tous les deux.

Son charabia ne me permit pas de comprendre ce qu’elle avait à dire, je sentais cependant tellement de sincérité et d’aplomb. Je lui promettais que, plus jamais, elle n’aurait à supporter ou subir des ordres autres que ceux de sa Mère ou moi.

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19 février 2010 5 19 /02 /février /2010 14:06

La végétation m’a sauté aux yeux. Du vert, enfin. Des semaines que tout n’est que bleu, gris, pastel et argent.

Le dôme se dresse, fier, rutilant. J’entends des oiseaux, j’entends le doux déferlement des vaguelettes sur la côte ; la côte tant attendue.

Je pose le pied dans un sable fin, blanc et chaud. Je m’allonge et sent la chaleur se répandre tout le long de mon corps. Les branches balancent lentement au-dessus. Les feuilles se tortillent dans un crépitement mélodieux. Des odeurs me parviennent, odeurs de terre chaude, fumés exotiques, vapeurs humaines et animales.

Plus aucun mouvement, alors la tête me tourne, la planète se met à bouger, m’obligeant à ouvrir les yeux, fixer l’arbre qui me surplombe. Les nuages me donnent cette impression que le cocotier va me tomber dessus. Une coco chute dans un bruit sourd, étouffé par le sable, puis reste immobile à mes côtés. Je la contemple, j’imagine son lait, mon palais s’assèche, j’ai le gosier collé.

Quelques pas suffisent, mes coudes se posent sur un comptoir. Des visages autour, la conversation commence, les verres se vident et se remplissent.

La lumière diminue, le décor s’assombrie, le ciel brille de milles feux tournoyant.

Je m’affale sur le dos, le sable est encore chaud, la planète tangue de plus belle. Des mains me secouent, des paroles me parviennent, indéchiffrables. Je souhaite ne plus bouger, je suis bien, je souris, des bruits terrestres m’envahissent, les odeurs m’ensorcellent, je ferme les yeux.

Demain, le jour viendra encore.

Demain, j’irai un peu plus loin.

Demain je rencontrerai.

On n’apprivoise pas le premier jour.

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11 février 2010 4 11 /02 /février /2010 17:44

La lumière s’intensifiait, je percevais un bruit délicat, familier. Les paupières lourdes, je peinais à les activer, à les soulever. Mon corps immobile ne répondait plus. Les images m’ont assailli brutalement. Une tempête féroce avait envahi l’atmosphère, écrasant les sons qui m’étaient délicieux. Le grondement imprégnait ma peau, mes os, mon cerveau. Des jets lumineux me tiraillaient les rétines.

Je fermais les yeux, me concentrais, dans une tentative d’abstraction de l’environnement. Un flash intense accompagna un choc sombre et me projeta dans un monde vide. Tout n’était que blanc, aucun relief, aucun objet, aucun son. J’évoluais dans un néant qui m’appartenait et ne contenait que moi.

Je sentis le manque des êtres autour. Mes oreilles bourdonnaient de cette absence totale de vibration sonore. Ma perception visuelle me tétanisait, je plissais les yeux, le blanc m’éblouissait. Je tentais de hurler et restais sans voix.

Puis lentement, le blanc se dissipait, des couleurs réapparaissaient, dessinant la cote, l’océan, les maisons, les arbres. Des bruits me parvenaient par vague puis devinrent constants. Je sentais mon corps à nouveau. Je me levais péniblement, contemplais un ciel dépourvu de nuage. Ma moto en flamme s’évaporait dans le néant.

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10 février 2010 3 10 /02 /février /2010 21:01

J’ai erré plusieurs mois. J’ai rencontré d’autres civilisations, découvert des paysages que je n’aurais pu soupçonner. J’ai traversé des océans, des rivières, des lacs, des chaînes montagneuses, de grandes plaines fleuries, des forêts en tout genre.

Chaque fois que mon cœur s’émerveillait de la puissance naturelle, je sortais la feuille de ma poche, je voulais que mon Grand Chêne puisse ressentir les vibrations de notre monde. Il a participé à chacune des conversations que j’ai échangé au fil du temps. Il me donnait du courage, il me donnait de l’aplomb. Cette petite feuille dans la poche cœur de ma chemise se révélait être une des raisons essentielles de ce voyage.

Je repensais à son immobilité de jadis, la joie qu’il éprouvait à voir les promeneurs. Il allait, à présent, à la rencontre de la planète par mon intermédiaire. Chaque jour, je le sentais un peu plus fort, un peu plus présent et j’avais le sentiment que c’était lui qui orientait mon chemin.

Je retrouvais un regard enjoué, naïf et heureux que j’ai perdu lors de mon passage à l’âge « adulte ». Or ce regard n’était plus le mien, mais celui de mon Chêne au travers de mes rétines. Je suffoquais de plaisir à l’idée que du haut de sa colline, il pouvait contempler notre terre, rencontrer ses habitants, émettre des envies de destinations et d’aventures.

La terre est ronde et malgré les détours, malgré un périple dépourvu de cartes et de boussoles, je me retrouvais un matin au pied de la colline. J’avais marché toute la nuit, absorbé dans mes souvenirs, éclairé par une lune heureuse couvrant la planète de son reflet argent.

Je mis du temps à comprendre où je me trouvais. La colline était nue. Un tapis d’herbe frissonnait au gré du vent, les pâquerettes dansaient, célébrant un rayon de soleil encore timide. Le Chêne n’y était plus. Je ne voyais que le bleu du ciel enrober cette masse ronde et verte.

La panique me saisit un court instant. Je tâtais ma poche et me rassurais de sa présence. Je laissais là la colline et précipitais le pas vers ma demeure.

Comment aurais-je pu imaginer ce que je découvris ?

La première image fut celle du tamanoir. Il avait doublé de volume. Il n’avait probablement plus bougé depuis des mois. Une flaque d’eau se trouvait à sa portée et une fourmilière géante à proximité de son museau. Il n’avait qu’à incliner la tête pour plonger son tube dans ce monticule agité. Un air de béatitude émanait de l’animal. Je m’étais concentré sur lui afin de digérer progressivement le choc  ressenti à la vue de « mon » habitation.

Les pièces étaient séparées et portées par différentes branches, sur différents niveaux. Il me semblait distinguer de nouvelles espèces. Le Grand Chêne avait muté !

Chacune des pièces de la maison abritait maintenant  un type de végétal rencontré lors du voyage. La cuisine protégeait un Cocotier. La chambre d’ami logeait un Baobab. La salle de bain hébergeait un Manuka et un essaim d’abeilles. Ma chambre dissimulait un Séquoia et juste à l’entrée, un petit Bonzaï montait la garde. Chacun de ces arbres avait pour base le tronc robuste de mon Grand Chêne.

Lorsqu’il me vit, sa joie fit trembler la maison entière. J’étais pris d’un mélange d'émotion profonde, d’anxiété et d’ébahissement.

-Nous voilà de retour ! dit-il

-« Nous » ? Mes sentiments disaient donc vrai… Tu as une façon bien étrange de rapporter des souvenirs !

-C’est ton ouverture d’esprit qui a fait grandir en moi cette différence. C’est la découverte qui a muri sur mon tronc.

-Tu as même pensé aux oiseaux. Ils semblent bien se connaître. Leur chant est tellement mélodieux.

-Ils m’ont fait vibrer à préparer ton retour. Je t’en prie, entres maintenant. Tu étais venu pour bavarder et nous voici solidaire. Tu es ici chez toi ! Viens découvrir notre demeure. Puis-je t’offrir du lait de coco ?

Je suis entré. Une satisfaction intense m’envahissait. Je goutais la coco, dégustais le miel de Manuka, c’était un délice, c’était Nous ! Je m’allongeais sur la branche de Séquoia et laissais toute cette vie m’enivrer tendrement.

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8 février 2010 1 08 /02 /février /2010 22:08

Serge est né, a vécu et vit toujours dans un petit archipel du pacifique regroupant cinq îles toutes plus paradisiaques les unes que les autres. Sur son bout de terre, les enfants passent d’une famille à une autre, ils sont tous considérés comme frères et sœurs, et prennent soin les uns des autres. Notre monde moderne leur est lointain. En dépits d’une certaine présence militaire américaine, ils se nourrissent de chasse, de pêche, de culture, de couchers de soleil et de la douceur de vivre tout au long de l’année.

Serge s’est très vite marginalisé par une capacité à passer ses journées entières inactif et contemplatif. Il avait choisi un arbre à pain de la famille des Artocarpus pour se protéger du soleil et profiter pleinement du temps qui passe en bougeant le moins possible. Il admirait l’océan, s’amusait des rires d’enfants, s’étonnait de tant d’agitation chez les adultes, mais avait toujours dans les yeux une lueur brillante et joyeuse.

Un matin, émergeant d’un sommeil rêveur, il sentit des picotements dans la paume de sa main gauche. Un bourgeon y était apparu durant la nuit et il le contempla, ne prêtant plus attention alentour. De légères striures bleutées émanaient de la pousse et au terme de la journée, avaient gagnées l’intégralité de sa paume. A la nuit tombée, il se rendormit sous un tapis d’étoiles, l’esprit accaparé par cette étrangeté nouvelle.

Plusieurs jours s’écoulèrent, les lignes bleues avaient envahi le dos de sa main et une brindille de quelques centimètres se dressait fièrement dans sa paume.

Une autre nuit douce et somptueuse régna sur le village. Serge dormait, comme à son habitude, appuyé sur l’arbre à pain, la main posée à terre, la paume admirant la voie lactée imposante.

Au réveil, sans surprise, il découvrit que sa main avait pris racine et il ne pouvait, désormais, plus la soulever. Le petit arbre grandissait. Ne voulant pas épuiser Serge, il avait décidé de rejoindre la terre afin de satisfaire son besoin vital et naturel. Loin d’être paniqué, Serge éprouva immédiatement un amour inconsidéré pour son nouveau moi. Ses yeux exprimaient autant de tendresse qu’une mère découvrant son nouveau né.

L’arbre grandissait de jour en jour et serge en prenait le plus grand soin. Il retirait les insectes, lui offrait de l’eau, et le grattait gentiment du bout de ses doigts encore libres de leurs mouvements. Il se sentait d’autant mieux qu’il détenait maintenant une raison irréfutable pour se prélasser, allongé, nuit et jour et semaine après semaine.

Les villageois eurent un instant de panique à la naissance de l’arbre. Certains voulaient l’arracher, d’autres proposaient de trancher le poignet de Serge et lui trouver une activité. Puis voyant le bonheur constamment affiché sur son visage, ils ne purent qu’approuver. Un petit groupe se relayait pour nourrir et tenir compagnie au nouvel homme-arbre du village.

Mois et années passèrent, l’arbre donnait de gros fruits juteux, particulièrement appréciés des habitants de l’île. Un troc s’établissait : nourrir et hydrater Serge en échange des fruits, des feuilles, de la sève, de l’écorce, qui avaient développés des vertus étonnement adaptées au corps humain. Des masques de beautés, des crèmes hydratantes, des lotions miracles, d’autres rigolotes, un nombre incalculable de produits avait été créé en utilisant toutes les ressources de l’homme-arbre.

Serge était un homme comblé. Sa marginalité abreuvait aujourd’hui le village de milles bienfaits naturels et chacun le saluait d’un large sourire omniprésent. Bien qu’il n’ait jamais eu d’ambition, il se sentait le cœur léger du bonheur qu’il procurait.

L’île, sous tutelle Américaine, devait subir un lifting complet pour répondre à la demande croissante du tourisme mondial. Malheureusement, Serge se trouvait sur un lopin de terre qui appartenait désormais à un certain Ronald Mc Donald. De nombreux représentant, tout de pingouin habillé, se rendaient auprès de lui, tournant autour du pot, n’ayant pas le courage de lui annoncer froidement que son arbre devait être abattu, ce qui sous-entendait la perte de sa main. Serge conservait son sourire, faisait mine de ne pas comprendre, mais avec un minimum de sentiments humains, nous pouvions déceler une panique certaine consciencieusement refoulée.

Un pingouin parmi les pingouins avait ressenti un pincement au cœur face à cette étrangeté et s’était mis en tête de sauver cette merveille de la nature. Issu d’une grande famille de commerçant, il décela immédiatement le potentiel pécunier des produits dérivés de l’arbre. Quelques heures lui suffirent pour convaincre l’ensemble des membres du conseil du village ; le gentil pingouin s’occuperait de toute la partie commerciale, la machine était lancée.

Chacun des habitants se mit à fabriquer les produits, de jolies emballages étaient fournis et bientôt, les élixirs de l’homme-arbre se répandaient de Tokyo à Los Angeles en passant par Paris, Londres, New-York ou encore Rome. La production étant réduite, les potions se vendaient à prix d’or.

Pendant que les multinationales cherchaient un moyen, dans le respect des droits de l’homme, de se débarrasser de Serge, Le village avait amassé suffisamment de deniers pour racheter la parcelle de terre et empêcher "l’enseigne grasse" de prendre racine dans ce petit coin de paradis. Sans burger surfait, pas de touriste, nombre de projets furent abolis et la petite entreprise finit par racheter l’île entière. Les 4 autres îles furent malheureusement envahies de bâtiments récents aux enseignes toutes plus glamour les unes que les autres : Club Med, Ibis, Hilton etc …

L’île à l’Homme-Arbre fut, quant à elle, déclarée Richesse du Monde. L’activité commerciale cessa. Un accord fut établi. Le gentil pingouin gardait le reste des recettes engendrées. Serge et ses compagnons pouvaient à nouveau jouir de leur vie paisible imprégnée de nature et joies simples. Un coucher de soleil extraordinaire aux couleurs Or et pastelles mit un terme à cette histoire.

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6 février 2010 6 06 /02 /février /2010 21:47

Je venais de remplir ma feuille d’impôts. J’étais parvenu à bloquer la demi-heure nécessaire à cette activité exécrable. Réellement, j’avais réussi à obliger mon cerveau à lire les quelques lignes de ma feuille simplifiée et ordonné à ma main de signer au bas de la page qu’habituellement je jetais sans remord. J’ai toujours cru que c’était une langue étrangère. Erreur, avec un minimum de concentration, les mots me sont bien apparus en Français.

Relativement fier de ma prouesse, je tenais fermement l’enveloppe contenant déclaration et chèque. J’avais goulument humecté le timbre de peur que celui-ci ne se décolle durant le trajet. Quelle saveur détestable ! J’ai toujours rêvé de posséder cette petite éponge que l’on voit dans les bureaux de poste et ma fille ne voulait pas me prêter celle de son tableau noir sous un prétexte qui m’est encore obscure. C’est donc la langue pâteuse au goût hideux que je claquais la porte derrière moi et enfourchais ma bicyclette.

Je déboulais dans la rue et me fit agresser de klaxons retentissants. Cette lettre m’obnubilait à tel point que plus rien n’existait autour, je frisais la catastrophe. Le cœur battant la chamade, j’empruntais la petite allée et croissait Paul qui me gratifia d’un sourire. Je me retournais pour le saluer, modifiais ma trajectoire par inadvertance et me calais le poteau électrique entre les deux yeux.

Lorsque je recouvrais mes esprits, La Lettre était à quelques mètres abandonnée sur la route. Titubant, je me dirigeais vers elle. Un sale cabot s’en empara avant moi et détala. Je pouvais voir une jubilation certaine dans ses yeux ; armé, je n’aurais pas hésité une seule seconde … Ne l’étant pas, je commençais à lui hurler dessus en lui courant après. Il me narguait, je m’énervais, les passants s’ébahissaient, ma lettre s’humidifiait…

Pour m’échapper, il traversa la nationale… la moitié de la nationale… Un véhicule le percuta de plein fouet. Je constatais que les chiens volaient très bien. La lettre lui échappa, fut pris dans une bourrasque soudaine et disparue de ma vue.

Je me précipitais vers l’animal. Il respirait encore, les yeux ahuris et la langue pendante. Oh ! Joie ! Sur cette même langue se trouvait mon timbre flottant sur sa bave abondante. Je m’en emparais, lui tirais la langue et m’éloignais discrètement, mon cœur adoucit de cette victoire.

Depuis, je ne travaille plus, ne paye plus d’impôt, et gère le peu de courrier obligatoire par internet. J’ai fait encadrer ce timbre qui trône maintenant fièrement au-dessus de ma cheminée comme le trophée précieux de ma liberté.

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4 février 2010 4 04 /02 /février /2010 17:39

Je me suis enfoncé dans cette forêt. Il y avait des champignons, des châtaignes et des noisettes. J’en ai ramassé et ai étalé chacun de ces mets sur une souche large, plate laissant présager l’âge très avancé que le défunt arbre devait avoir. A se demander pourquoi l’abattre, mais là n’est pas le propos et j’étais enchanté de la trouver.

Les châtaignes piquent, mais si l’on réussi à l’atteindre, son fruit peut être fondant, délicieux, et replonge l’esprit en enfance : les feux de cheminée, les jeux de société, la grisaille humide dehors, un sentiment réconfortant.

Les noisettes, plus facile à décortiquer, beaucoup moins de saveur, assez peu de souvenirs, et le risque de se détruire les dents en tentant de les extraire de leur carcasse robuste. Sans doute à laisser pour les écureuils donc.

Les champignons, met à haut risque !! Qui ne tente rien n’a rien dit-on. S’il y a risque, la récompense peut donc être supérieure. Ils sont d’autre part d’une aisance déconcertante à manger, il suffit de les porter à la bouche.

Allier facilité et danger, forcément, ce sont les champignons que j’ai mangé…

Les châtaignes se sont mises à danser. Les écureuils sont venus chercher les noisettes, se sont assis devant moi et nous avons bavardé. Ils m’ont expliqué comment les ouvrir sans se casser les dents. Chose incroyable, des griffes sont apparu au bout de mes doigts et j’ai pu mettre leur conseil en application. Ils avaient raison, force est de constater qu’ils ont l’expérience sur plusieurs générations. Un arbre est venu me sourire et m’a félicité. Il m’a dit que j’avais la dextérité d’un écureuil et il est soudainement parti en courant en criant que les bûcherons qu’il pensait avoir semé, arrivaient par le Nord. Je ne les ai jamais vu, par contre, j’étais surpris de voir une baleine sauter d’arbre en arbre en imitant le cri de Tarzan. Je ne suis pas dupe, j’ai bien vu que c’était une baleine. Ceci étant, j’étais persuadé que ces mammifères ne savaient que nager. Commençant à sentir la fatigue, j’ai pris le tapis roulant pour sortir de la forêt. Il était très lent, extrêmement lent. J’ai donc eu le temps d’apercevoir Bambi buvant un coup avec Mickey, mais ils ont déguerpi à la vue d’un nuage orangé et rose qui semblait se nourrir de rats et de souris. Bambi aurait pu rester.

Arrivé à la lisière de la forêt, se trouvait cette même souche. Je m’y suis assis. Les châtaignes étaient toujours là, mais cette fois bien plantées dans mon postérieur. Chance étonnante, Alice est arrivée et me les a retirées. Elle a mangé un autre de ses buvards et s’est volatilisée.

Quant à moi, je suis resté là, en pleine extase devant la souche, qui était sans doute la plus belle chose qu’il m’ait été donné de contempler.
IMG_0056.JPG 

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